L’enquête

Ce vaste ensemble architectural s’étale sur 250 m² et trois niveaux. On y accède par un escalier monumental qui descend entre deux tribunes surélevées surplombant la grande salle, elle-même richement décorée et bâtie selon des méthodes extrêmement modernes et onéreuses pour l’époque.

Tous ces éléments participent d’une mise en scène dont l’objectif était de souligner le pouvoir et la position sociale du propriétaire des lieux qui affirmait ostensiblement sa puissance.

Cependant, ni l’archéologie ni les archives de la ville ne permettent d’identifier clairement l’usage réservé à ce lieu prestigieux. Au cours des fouilles, plusieurs hypothèses furent émises et rejetées :

Un édifice religieux : la disposition des pièces convient particulièrement (à l’exception des 2 caves) au rite hébraïque. De plus, les Ducs de Bourbon ont accueilli et protégé les Juifs. Mais les fouilles n’ont révélé aucun symbole religieux gravé ou sculpté dans la pierre.

Un édifice militaire : il aurait fallu pour valider cette hypothèse retrouver dans la pierre écus, blasons ou faisceaux d’armes, ou encore une litre peinte (bandeau noir horizontal portant les écus des chevaliers et des gens d’armes).

Un édifice civil : le bâtiment est toutefois bien trop richement décoré pour être une taverne. Quant aux lieux de réception (salles de bal ou de banquet), ils se trouvaient le plus souvent en rez-de-chaussée ou dans les étages.

Un édifice officiel : encore une fois, le lieu est trop majestueux pour avoir servi de tribunal ou de cachot. Cependant, son ostentation laisse croire qu’il servait bel et bien à recevoir du public dans un cadre d’affirmation du pouvoir seigneurial.

Moulins est une ville neuve qui s’est formée au Xe siècle par l’agglomération de petites seigneuries autour d’une ancienne et vaste villa Gallo-Romaine qui s’était implantée au bord de l’Allier. Les seigneurs détenteurs de fiefs prélevaient annuellement une sorte d’impôt foncier féodal appelé le cens. Cet impôt était payé annuellement parfois en espèces sonnantes et trébuchantes mais le plus souvent en nature : froment, gelines (poules), moutons, salaisons, pièces de drap et corvées. En contrepartie, les seigneurs devaient, suivant le code féodal, assurer la protection de leurs sujets, rendre la justice et entretenir les voies de circulation (routes, rivières, canaux).

Il est donc fort probable que pendant près de 200 ans, les caves Bertine servirent de lieu de perception du cens pour la seigneurie de Montaigu-Listenois puis pour la famille Bertine qui racheta le fief à la fin du XIVe siècle.

emmaemma